Réflexion autour du libre arbitre
Petite réflexion sur le libre arbitre et les liens avec notre environnement.
Posons les bases de la réflexion
Chez les libertariens, la notion de libre arbitre est centrale. Nous entendons par là le libre choix des individus, donc l’action concrète réalisée par chacun de nous à tout instant, sans coercition. Il y a action, et c’est tout.
Les marxistes, quant à eux, avancent que nous sommes intimement liés à nos conditions matérielles d’existence, et que donc, le libre arbitre n’existe pas (car nous ne “décidons pas, nous subissons”). J’aimerais dans ce billet, non pas abonder dans le sens marxiste (tout de même!), mais au moins exprimer ma vision sur ce point: nous n’agissons pas “ex-nihilo” (à partir de rien), nous sommes bien des êtres bioculturels, aux multiples influences.
Ainsi, dire que "les individus disposent d'un libre arbitre leur permettant de prendre des décisions indépendamment de leur socio-culture” me semble être une erreur. Nous agissons, indéniablement (= le quoi), mais les motivations intrinsèques (= le pourquoi) sont une toute autre chose. Confondre l’un et l’autre, c’est se heurter à un plafond de verre classique marxiste.
Je souhaitais écrire un article sur ce sujet car les libéraux sont parfois accusés d’être totalement hors-sol sur cette question. Nous penserions que les individus sont des êtres désenracinés, des numéros ou des entités remplaçables. Nous penserions aussi qu’il “suffit de vouloir” dans la vie, que tout le monde peut “devenir riche” et/ou que l’agir n’a rien à voir avec ce que nous sommes profondément.
Je ne puis parler au nom de tous, mais me concernant, c’est presque tout le contraire. Je crois que la différence est partout, qu’elle est précieuse, et que la singularité de chacun permet l’enrichissement de tous. En réalité, ce procès doit être fait bien davantage aux mondialo-communistes, qui souhaiteraient un seul gouverment, ainsi qu’un monde purement égalitariste et contrôlé.
Mais revenons sur notre point, entre le libre arbitre, et ce qui le sous-tend.
Dépasser le plafond de verre action/motivation intrinsèque
Nos actions sont corrélées à notre socio-culture, à notre environnement, à notre éducation, et même à notre biologie. Nous sommes mûs par tout notre être, à tout instant (et cet être est lui-même mouvant, car nous changeons).
Si j’aime Lino Ventura autant que Jean Gabin, c’est parce que j’ai été bercé par leurs films plus jeune et que j’en garde de bons souvenirs. Ce n’est donc pas un “pur hasard” si j’aime les revoir jouer leurs meilleures scènes: j’ai été marqué au fer rouge par elles et j’y reviens naturellement.

Les libertariens que je connais (assez peu, je le confesse) ne commettent pas cette erreur, et savent bien que nous sommes conditionnés/influencés. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je ne suis pas démocrate. En plus d’être une tyrannie de la majorité, elle implique la création d’une fabrique de l’opinion géante. Si la doxa s’accroche tant au contrôle des médias, ce n’est pas pour rien. Les idées sont surpuissantes.
Il n’y a donc pas débat, à mon niveau. Il y a l’action, indiscutable, et sa raison profonde. Mais c’est à cet ENDROIT précis que les marxistes se trompent. Pour eux, une différence de conditions de vie/de culture/d’éducation (= ce qui va motiver l’action) constitue déjà une agression (ils diront plutôt “oppression/exploitation”).
Les conditions d’existence aisées du “bourgeois” sont un crime par nature envers le “prolétaire” (ainsi, l’un détiendrait ses moyens de production et accumulerait du capital par exemple, l’autre pas), condamné à un environnement qui ne lui permettra jamais de se hisser hors de lui. Telle est, schématiquement, la pensée marxiste sur le sujet. C’est la raison pour laquelle ils se servent si souvent du déterminisme pour justifier leur position.
C’est une erreur. Et même, une erreur de compréhension du Droit (droit naturel). L’action est ce qu’elle est. Le Droit ne s’intéresse PAS à ce qui motive l’action, il s’intéresse à l’action elle-même. Le Droit nous garantit simplement de n’être ni agressé ni volé. Il est le protecteur de la propriété privée.
En fait, la neutralité absolue du Droit anéanti toute la pensée marxiste. Si jamais le Droit n’était pas neutre, donc qu’il s’intéressait à autre chose que l’action elle-même, ce sont les libertariens qui verraient leur logiciel anéanti. Sauf que si le Droit n’est plus neutre, c’est sa destruction même qui serait enclenchée (c’est le cas dans nos démocraties de droit positif), laissant la porte ouverte à l’arbitraire. Là où le Droit n’existe pas, l’arbitraire pointe le bout de son nez.
J’attends toujours une démonstration imparable de la non neutralité du Droit, ce qui revient donc à détruire la notion même de propriété privée. Prévenez-moi si vous avez une telle démonstration sous la main!

Pour le dire autrement, les conditions matérielles d’existence et/ou tout ce qui relève de nos influences n’ont aucune importance sur le plan du Droit. Personne n’a dit/promis que nos influences seraient de “même qualité”. Il est évident que l’enfant qui naît d’une mère toxico et d’un père violent part avec un poids énorme aux chevilles. Et que celui qui naît dans une famille fortunée part avec des avantages financiers certains.
Je vais le redire: personne n’a dit que la vie était la même pour tous et/ou que nous aurions les mêmes “chances” dès le départ. Ainsi, personne n’a dit que nous agissons à partir des mêmes influences et/ou conditions d’existence.
Par ailleurs, j’aimerais retenir votre attention sur trois éléments:
Dans mon exemple, bien naître ne constitue PAS une agression envers qui que ce soit (on revient au Droit comme garant de la propriété).
Être fortuné n’empêche personne de le devenir aussi, ou du moins, de se hisser hors de son environenemnt. Le “bourgeois” ne bloque pas l’accès de la richesse au “prolétaire”.
La vie n’est pas une route tracée à l’avance/un destin monolithique: c’est un système ouvert et complexe, changeant et parfois imprévisible.
Pour des raisons de longueur, je réserve un développement du dernier point pour un prochain article. Mais j’espère au moins qu’avec ces lignes, vous aurez saisi la différence à faire entre l’action et ce qui la motive. Si vous amalgamez les deux, donc que vous considérez que les conditions d’existences/matérielles SONT déjà un crime, vous passerez à côté de toute possibilité d’émancipation, et la notion de Droit vous restera étrangère.
Par leur discours déterministe et plafonné, les marxistes condamnent les “prolétaires” à le rester. Les libertariens, au contraire, sont à la fois conscient de ce qui se joue en chacun de nous, mais savent en même temps que la vie n’est que mouvement et changement. En fait, les libertariens sont les seuls à offrir une porte de sortie à tous ceux qui considèrent leurs conditions comme médiocres et qui voudraient y remédier.
"Il y a action, et c’est tout." - L'action se constate, tout simplement. La contester, c'est agir, donc se prendre les pieds dans son propre tapis. La libre action est un fait empirique. Qu'importe au-delà.